Malgré le renforcement de la garantie des biens de consommation, on continue à la contourner

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Depuis l’entrée en vigueur le 1er juin 2022 de la loi du 20 mars 2022 modifiant notamment les dispositions de l’ancien Code civil relatives aux ventes à des consommateurs, la protection du consommateur en matière de garantie des biens de consommation a été renforcée de manière significative. L’un des principaux changements a été de faire concorder la durée de la présomption de défectuosité des biens de consommation avec celle de la garantie légale des biens de consommation de deux ans.

Auparavant, un bien de consommation, présentant un défaut de conformité, était présumé défectueux au moment de la délivrance pendant une durée de 6 mois, à compter de la vente. Pendant cette période, la charge de la preuve du contraire appartenait au vendeur. Depuis le 1er juin 2022, la présomption de défectuosité du bien de consommation court pendant deux ans à compter de sa délivrance au consommateur.

Contre toutes attentes, cette réforme majeure tant pour les vendeurs professionnels que pour les consommateurs n’a, de manière plutôt surprenante, fait que peu de vagues lors de son entrée en vigueur.

Dans la pratique, on constate que trop peu de consommateurs sont, en réalité, au fait de leurs droits renforcés en matière de garantie des biens de consommation. Ils sont, par conséquent, des proies faciles pour certains vendeurs professionnels (connus et moins connus), qui en profitent pour mettre en place des entraves et contraintes, privant les consommateurs non-avertis des bénéfices de cette réglementation impérative. A titre d’exemple, on identifiera :

  • Le maintien illégal d’une présomption de défectuosité et de renversement de la charge de la preuve de l’absence de défaut, limitée à une durée de 6 mois ;
  • L’exclusion pure et simple du consommateur au bénéfice de la présomption de défectuosité ;
  • L’imposition illégale de conditions plus strictes que celles prévues par la loi pour bénéficier de la garantie : obligation de notifier le défaut au vendeur professionnel par courrier recommandé, obligation de notifier le défaut au vendeur dans un délai inférieur au délai légal …) ;
  • Le refus du vendeur de suspendre l’écoulement du délai de la garantie légale et de la présomption de défectuosité pendant le temps nécessaire à la réparation, au remplacement ou pendant les négociations entre parties en vue d’aboutir à un accord amiable ;
  • Le refus du vendeur d’agir diligemment, en reportant la responsabilité du défaut sur le fabriquant.  

De telles entraves à la protection des droits du consommateurs ne sont pas acceptables. Il apparaît donc à propos de refaire le point sur quelques principes fondamentaux encadrant les droits du consommateur en matière de garantie des produits défectueux :

  1. Le consommateur dispose d’une garantie légale de deux ans contre tout défaut touchant les biens de consommation acheté auprès d’un vendeur professionnel (ce délai peut être réduit pour les biens d’occasion, sans pourvoir être inférieur à un an) ;
  2. En principe, sauf preuve contraire apportée par le vendeur professionnel (ou exception), le défaut de conformité, qui apparaît dans un délai de deux ans à partir de la délivrance du bien de consommation, est présumé exister au moment de la délivrance ;
  3. Pour profiter de la garantie légale, le consommateur doit nécessairement informer le vendeur de l’existence du défaut de conformité dans les deux mois à compter du jour où il a constaté le défaut. Aucun mode de notification spécifique du défaut ne peut être imposé au consommateur. Par sécurité, il est, cependant, conseillé d’utiliser une méthode permettant de disposer d’une preuve de l’envoi ;
  4. Dans un premier temps, le consommateur peut exiger du vendeur la réparation du bien de consommation ou son remplacement, sans frais, à moins que le recours choisi ne soit impossible ou que, comparé à l’autre, il n’impose des coûts disproportionnés pour le vendeur, compte tenu de l’ensemble des circonstances. A défaut, le consommateur peut exiger une réduction du prix ou la résolution du contrat de vente ;
  5. Le délai de la garantie légale est suspendu pendant le temps nécessaire à la réparation, au remplacement du bien ou encore pendant la durée des éventuelles négociations entre le vendeur et le consommateur ;
  6. Toute clause contractuelle ou accord par lequel le vendeur exclu, déroge ou modifie anticipativement les droits du consommateur, résultant de la garantie des biens de consommation est nul ;
  7. En cas de refus dans le chef du vendeur de respecter ses obligations en matière de garantie des biens de consommation, le consommateur dispose d’un délai d’un an, à compter du jour où il a constaté le défaut, pour agir en justice contre le vendeur. Au-delà de ce délai, l’action du consommateur est considérée comme prescrite.

Espérons que cette petite piqure de rappel donnera aux consommateurs certaines armes nécessaires pour déjouer les pièges de vendeurs professionnels peu scrupuleux 

Frédéric PAQUE