Ordonnance bruxelloise du 27 juillet 2017: la régionalisation du bail résidentiel en marche

On l’attendait depuis un certain temps. La régionalisation du Bail d’habitation est enfin arrivée à Bruxelles. En 2014, le deuxième volet de la 6ème réforme de l’Etat prévoyait un transfert de compétence de l’Etat fédéral vers les Régions concernant la matière des baux d’habitation. C’est désormais chose faite.

En effet, le 27 juillet 2017, le Parlement bruxellois a, enfin décidé, au moyen d’une ordonnance, d’introduire sa propre réglementation en matière de baux d’habitation. Cette réforme, introduite au Titre XI (articles 215 à 266) du Code Bruxellois du Logement, est effectivement entrée en vigueur le 1er janvier 2018.

Depuis lors, cette nouvelle règlementation remplace effectivement la loi du 10 février 1991 relative au bail de résidence principale en Région de Bruxelles-Capitale et s’applique de manière impérative à tous les baux d’habitation, y compris les baux en cours. Seules les nouvelles dispositions prévues aux articles 217, 218 et 219 §§4 et 5 sont inapplicables aux baux en cours au 1er janvier 2018, dès lors qu’il s’agit de dispositions totalement nouvelles auxquelles les parties n’auraient pu se conformer avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance.

Avec l’inauguration du nouveau Titre XI, la Région bruxelloise entérine, d’une part, quelques nouvelles règles générales en matière de bail d’habitation. D’autre part, elle complète la réglementation des baux existants et introduit plusieurs nouvelles formes de baux, afin de garantir une meilleure sécurité juridique, et compte tenu des besoins socio-économiques actuels :

  1. Nouvelles règles communes :Désormais, le législateur bruxellois a, entre autres, décidé de:
    • consacrer  une véritable obligation légale d’information précontractuelle dans le chef du bailleur (estimation du montant des charges proche de la réalité, certificat PEB …), ainsi qu’un arsenal de sanctions s’y rapportant (résolution du bail, dommages et intérêts, limitation judiciaire du montant des charges dues par le preneur à celui communiqué avant la conclusion du bail),
    • consacrer  une nouvelle opportunité pour le bailleur de réaliser des travaux en cours de bail, afin d’améliorer le PEB de son bien (uniquement pour les baux de longue durée) ;
    • réformer la sanction civile relative au défaut d’enregistrement pour le bail de résidence principale et pour le nouveau bail de logement étudiant (Le preneur peut désormais mettre fin au bail sans préavis ni indemnité à condition d’avoir préalablement mis le bailleur en demeure d’enregistrer et que cette demande soit restée sans suite pendant deux mois) ;
    • permettre au bailleur de considérer le bail comme résilié sans préavis ni indemnité en cas de décès du preneur pour autant que le logement reste inoccupé après le décès et que le loyer et/ou les charges restent impayées pendant deux mois (récupération de la garantie locative sur simple requête unilatérale auprès du juge de paix) ;
    • considérer comme nulle et non avenue toute clause d’arbitrage convenue par les cocontractants avant la naissance d’un différend ;
  2. Baux existants complétés et nouvelles formes de baux :

Le bail de résidence principale :

  • les dispositions existantes relatives au bail de résidence principale restent globalement applicables ;
  • le législateur a enfin décidé de réglementer le bail de courte durée (maximum 3 ans). L’une des avancées notables concerne la faculté de résiliation des baux de courte durée (Le preneur peut, par exemple, décider à tout moment, sans motif, de résilier le bail moyennant un préavis de trois mois et un mois d’indemnité. La même règle s’applique au bailleur, à l’exception du fait que le bailleur ne peut user de cette faculté lors de la première année du bail.) ;
  • le législateur s’est également résolu à sanctionner le bailleur qui ne consigne pas la garantie locative sur un compte bloqué (dans ce cas, le bailleur est tenu de payer au preneur des intérêts au taux moyen du marché financier sur le montant de la garantie, à compter de la remise de celle-ci avec comme minimum le taux légal).

Le bail de logement étudiant :

  • bail présumé conclu pour une durée maximale de douze mois (durée inférieure autorisée) ;
  • pour que le régime juridique relatif au bail de logement étudiant s’applique, il faut que les parties y consentent expressément et que preneur apporte au bailleur la preuve de son inscription régulière dans un établissement d’études ;
  • certains avantages notables de cette forme de bail concernent d’une part la faculté de prolongation automatique du bail (le bail de un an est prolongé automatiquement par période de un an si l’étudiant reste dans les lieux) et d’autre part la réglementation relative à la résiliation du bail (le bailleur peut mettre fin au bail à son terme moyennant un préavis de trois mois. Le Preneur peut mettre fin au bail à tout moment, moyennant un préavis de deux mois, à condition que le bail soit d’une durée supérieure à trois mois. Il peut y mettre fin sans préavis s’il quitte les lieux au terme du bail).

Le bail de colocation :

  • il s’agit de la location d’un même logement par plusieurs preneurs, formalisée par la conclusion d’un seul contrat entre le bailleur et les preneurs ;
  • ce régime s’applique uniquement si les parties y consentent ;
  • ce nouveau type de contrat formalise l’existence d’une solidarité entre les colocataires vis-à-vis du bailleur, ainsi que l’obligation pour le colocataire intéressé de trouver un colocataire remplaçant en cas de résiliation anticipée.

Le bail d’habitat intergénérationnel et solidaire est une nouvelle forme de bail encore en projet, visant à créer une forme d’habitat collectif, pouvant notamment s’inscrire dans une optique sociale.

Le bail glissant est un bail destiné à des personnes en état de précarité ou de fragilité et qui bénéficient d’un accompagnement social.

Pour plus d’informations relativement à cette nouvelle législation, n’hésitez pas à contacter Me. Frédéric PAQUE (frederic.paque@cairnlegal.be).